Entrée #23 - 31.12.21
Rédigé par roi_matou
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Inventé par les pères du concept de “paternalisme libertarien”, le nudge (“coup de pouce”) a fait l'objet d'une publication dans le magazine de l'Inserm en novembre. L'article revient sur cet outil de suggestion comportementale qui consiste “à modifier nos habitudes, sans nécessiter un niveau d'attention élevé et prolongé de notre part”.
De nombreux exemples sont cités, le plus souvent basés sur des
stimulations visuelles (étiquetage, marquage) non-explicites quant à
leur objectif réel. L'Inserm cite “une méta-analyse de 96
expérimentations [qui] montre que les nudges qui font appel à la
réflexion des consommateurs, comme le Nutri-Score, sont moins efficaces
que ceux qui touchent aux émotions”. Henri Bergeron, sociologue à Sciences Po Paris et directeur de recherche au CNRS cité par l'Inserm, rappelle que “les
nudges n'ont pas d'impact sur les conditions sociales d'existence,
comme le pouvoir d'achat. Fonder une politique de santé publique sur les
nudges est un projet minimaliste, qui renonce de fait à transformer la
société”. La revue des médias rapproche ces dispositifs des “dark patterns” (interfaces truquées), techniques de manipulation par le design très répandues sur le web et dont le but est “d'orienter l'utilisateur vers des choix qu'il n'aurait probablement pas faits en connaissance de cause”. Claude Castelluccia, directeur de l'équipe Privatics de l'Inria cité dans l'article, suggère que ces manipulations sont “les conséquences même du modèle économique de l'internet et de ses services “gratuits””. La revue des médias estime que dans le cas des nudges comme dans celui des dark patterns, et “à leur insu, il s'agit de priver les utilisateurs de leur capacité à choisir”.